La journée se terminait peu à peu, et le soleil était déjà couché depuis bien longtemps. Avec l'arrivée proche de la mauvaise saison, celui-ci se faisait la malle plus rapidement. C'était bien dommage, Chulyen aimait bien lorsque ses rayons le réchauffait. Enfin, l'heure était plutôt à la recherche d'un lieu où dormir. Aujourd'hui, alors qu'il se promenait, du moins qu'il tentait tant bien que mal de chasser, il avait entendu, au détour d'une conversation entre deux loups, l'un deux parler d'une certaine "Pampa Ocre". Bien que le solitaire se trouvait sur les Terres de Raja'ah depuis sept mois maintenant, il n'avait pas eu le temps de découvrir tous les lieux qui se trouvaient en territoires libres. Mais, et si ce lieu était dangereux ? Si je n'y étais pas le bienvenu ? Et si j'étais obligé de me battre ? Je ne sais pas me battre, du moins pas correctement ! Le loup s'arrêta un instant, regardant autour de lui. Est-ce réellement une bonne idée d'aller là-bas ? Je ne connais pas... Il pourrait se passer tellement de choses... Son regard se porta alors vers le ciel désormais gris, devenant d'un noir effrayant. Mais en même temps je n'ai nul part où aller... Que faire ?
C'était un débat constant en son fort intérieur. Pourtant, son instinct fut plus fort, et il reprit sa route, se dirigeant comme il le pouvait dans l'obscurité naissante, avec le peu d'informations qu'il avait engrangé. Ses oreilles étaient maintenant abaissées sur sa tête, et ses yeux étaient écarquillés par l'angoisse. Ses membres tremblaient presque. Non vraiment, il n'était pas serein quant à l'idée de s'aventurer en terre inconnue. Mais en même temps, avec le mauvais temps qui commençait déjà à arriver, il devait trouver un endroit où il pourrait se fixer, du moins durant les mauvais jours. Cette recherche constante d'un endroit où dormir le stressait particulièrement. Ça, et la chasse. C'était ses deux priorités, Chuly en était obnubilé.
Il faisait presque noir, et le vent soufflait de plus en plus. Mais pourquoi j'ai fais ça ? J'aurai très bien pu me trouver un petit endroit, et j'aurai cherché autre chose demain... Pourtant, il continuait de marcher. Je suis stupide. Stupide Stupide. Mais il s'arrêta lorsqu'une effluve provenant d'un autre canidé lui parvint. Non, non, non. Pitié. Je ne peux pas partir. Il a déjà due me sentir depuis longtemps. Non, non, non, au secours ! Il ne pouvait pas faire machine arrière. Alors il resta planté, n'osant plus bouger, scrutant attentivement les alentours.
"-Euh, bonjou... Bonsoir ?" dit-il d'une voix non assurée.

"-Bonsoir l'ami. Ne sois pas timide, approche donc."
Chulyen retint sa respiration. Il n'osait plus bouger, plus respirer, plus rien faire. Bouge, fais quelque chose, il pourrait trouver ça louche. Alors il s'assit, les bourrasques de vent agitant vaillamment son pelage crème, en retournant le sourire que le loup venait de lui adresser. Mais que fais-tu ? Tu te met en danger. Tes réflexes sont diminués dans cette position. Que faire ? C'était bien sa veine. Lui qui voulait être tranquille, trouver un endroit tranquille, et surtout en sécurité pour qu'il puisse dormir, bien que ses sens seraient toujours en alerte. Il rêvait de trouver sa cachette où il passerait son temps, un endroit où il passerait sa vie, son temps, sans que personne ne le trouve et vienne le déranger.
Mais voilà qu'il se retrouvait face à ce solitaire. Assis, devant lui. Stupide. Alors il arbora un sourire qui ne paraissait pas du tout naturel, mais au contraire forcé.
"-Ah mais je ne suis pas timide, ahah !"
Autoconviction.
"Que fais-tu donc dehors par ce temps ?" demanda-t-il en essayant de paraître normal.
Pourquoi n'essaies-tu pas de clore la rencontre au plus vite ? Stupide.  

Chulyen regretta soudain d'être comme il était. Dans la nuit, il avait du mal à voir son interlocuteur tant son pelage était noir. A contrario, l'autre solitaire devait correctement le voir, avec son pelage crème. Tu es désavantagé. Méfie-toi encore plus. Enfin, tu n'aurai pas à le faire si tu étais parti dès le début. Non, si tu n'avais pas cherché aussi longtemps un abri. Pourquoi je ne me suis pas posé dans la première cachette de fortune que je trouvais ? A oui, il me faut de la sécurité. Il faut que je sois sûr de ne rien craindre. Mais regarde, tu ne peux pas non plus rester ici. Ce solitaire pourrait te suivre, et te tuer pendant ton sommeil. Chulyen, qu'est-ce que tu fabriques ? Je suis stupide, idiot et tout ce qui va avec.
« Je laisse ma trace ici. Je compte bien m’imposer sur le long terme. Et toi alors ? »
Ces quelques mots firent sortir le loup au pelage crème de son conflit intérieur. Sans s'en rendre compte, il écarquilla les yeux, ahurie, apeuré par les mots de l'autre. S'imposer ? Mais qu'entend-il par là ? Je le savais, j'aurai dû faire demi-tour tant qu'il était encore temps ! Que va-t-il me faire ? Tu es cuit, Chulyen, c'est la fin de ton existence. Il se secoua la tête pour essayer de se remettre les idées en place. Il faut que je réponde. Trouve un truc à dire, aller. Et change cet air ahurie, tu vas passer pour quoi ! Il va se douter que j'ai peur, il va le sentir, je suis mort. Toutes ses idées se mélangeaient en son fort intérieur. Comme tout le temps. Mais pire encore cette fois-ci.
"- Oh, et bien bon courage ! Moi je divague simplement à... euh.. à la recherche d'un abri."
Mais pourquoi j'ai dis ça ? Cette fois c'est sûre, il va me suivre, et me tuer.
"- Mais, dis moi, euh.. Qu'entends... Qu'entends-tu par laisser ta trace ?"
CHULYEN ! Met fin à cette conversation. De suite. Idiot, idiot, idiot.

« Ici, les seuls abris possibles sont les crevasses qui ont été creusées par les saisons. Parfois elles sont assez grandes pour un loup. Il faut simplement savoir ou chercher. »
Après cette réponse, Chulyen adressa un petit sourire en guise de remerciement. Mais ce sourire n'avait rien d'un loup rassuré. C'était tout l'inverse. Il fallait dire que ce solitaire lui faisait vraiment froid dans le dos. Il était vraiment imposant, et le loup crème ne pourrait rien faire contre lui.
« Rien de bien méchant. Je fais simplement comprendre aux loups des meutes qu’ils n’ont rien à faire ici. Tu es un solitaire, cesse donc de trembler, tu n’as rien à craindre de ma part.»
Chulyen lâcha un petit rire nerveux qu'il ravala aussitôt. Oh non, il voit que je tremble, il voit que j'ai peur. Pourtant, sa dernière parole le rassura un peu. Sa petite voix intérieure continuait pourtant de lui hurler de ne pas faire confiance, et de partir au plus vite. Mais pour quoi passerait-il aux yeux des autres s'il venait à adopter ce genre de comportement ? Tu ne crains rien. Tu ne crains rien. Il la dit lui-même. Tu es un solitaire. Tu n'as pas à avoir peur. Il ne te fera rien. Ou alors il dit ça simplement pour te rassurer, et tu finiras éventré au fond du petit abri que tu te seras trouvé. Non, reste normal. N'attends pas longtemps pour répondre. Arrête de trembler. Ressaisis toi Chulyen !
"-Merci du conseil !" Dit-il en essayant de ne pas avoir la voix qui tremble. "Oh, mais qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? Pardon, c'est indiscret, je n'aurai pas due.." Lâcha-t-il en baissant le regard. "Ahah, je tremble parce que j'ai froid surtout !" Dit-il en essayant de paraître normal. "Au fait, je ne me suis pas présenté. Moi c'est Chulyen, et toi ?" Demanda-t-il avec un ton un peu plus détendu.
Mais son sang ne fit qu'un tour. Mais enterre toi six mètres sous la terre Chulyen ! Tu viens de lui révéler ton identité ! On ne révèle pas son identité aux inconnus ! Mais que je suis stupide, stupide, stupide !